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— Ne désirez-vous pas qu’il épouse mademoiselle de Magneval ?

— Sans doute ! Cent mille livres de rente !

— Eh bien, elle est de retour d’un petit voyage ; elle doit être chez moi ce soir. On pourrait inventer un incident, amener une rencontre romanesque. Elle a du dépit contre lui, elle voudra lui plaire. Elle est ravissante, il ne résistera pas. Espérez tout de l’avenir, si vous réussissez pendant trois mois à faire croire à Pierre qu’il est ruiné.

— Mais enfin, vous avez donc bien peur qu’il ne plaise à mademoiselle Vallier ?

— Eh bien, oui, j’en ai peur ! Je suis jaloux ; il y a des moments où je crois voir qu’elle est éprise de lui. Que voulez-vous ! j’ai quarante ans, il en a vingt-cinq, il est joli garçon, il écrit bien, il vient d’avoir un succès littéraire. Et puis la gloire d’avoir converti à l’amour un homme qui se vantait de n’y pas croire ! Les femmes sont si vaines ! Enfin j’ai peur. Aidez-moi, et je vous réponds qu’il épousera Jeanne.

— Eh bien, je vais lui écrire de venir me voir. Indiquez-moi le prétexte pour l’éloigner.

— Ce n’est pas difficile. Je viens dernièrement d’envoyer Louis Duport en Allemagne pour y gagner de l’argent. Envoyez Pierre auprès de lui sous prétexte que Duport peut vous faire rentrer une créance importante. J’avertirai celui-ci, il saura jouer son rôle. Quand il en sera temps, je lui ferai tenir une somme que Pierre vous rapportera et qui sera censée vôtre. Pendant qu’il sera en Allemagne, madame Duport ira y rejoindre son mari avec Jeanne. Essayons, ne nous laissons pas battre sans combattre. Voyons, vous êtes