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pecte l’argent : mais il aime encore mieux la condescendance à ses idées, et, pourvu qu’on proclame le culte de la richesse, on peut pratiquer sous ses yeux un peu de prodigalité. Les opulentes héritières ne sont-elles pas créées et mises au monde pour réparer les brèches qu’un joli garçon peut avoir faites à son patrimoine ?

Mais tu n’as pas voulu te mettre dans la nécessité de recourir aux héritières laides, acariâtres ou mal nées. La blonde, la brune, la rousse, ont passé devant toi en perdant leurs sourires. Aucun tailleur, aucune lorette, aucun marchand de chevaux n’avait mis la main sur ton honneur et sur ta liberté.

Tu t’es donc respecté, à telles enseignes que parfois ton oncle t’a trouvé trop sage, et traité de poltron et de pédant. Tu as fait plus que de mériter des injures qui t’honorent, tu as voulu ne pas être un ignorant, et tu as acquis une instruction générale assez solide. Comme tu es très-intelligent, tu n’as pas eu la moindre peine à te donner, d’autant plus que tu étais libre possesseur de toutes les heures de ta journée, et que personne ne te demandait son loyer et son pain. Comment, aujourd’hui que tu vas te demander ces choses à toi-même, plus mille autres choses dont la privation ne te serait pas possible, vas tu parer à la détresse par un travail hâté, fiévreux, héroïque ? La nécessité fait-elle tout à coup ces miracles pour ceux qui n’ont jamais frayé avec elle ? Je ne te dis pas non, mais permets-moi d’être inquiet.

Si je savais au moins quel genre de travail tu vas entreprendre ! mais tu ne parais pas le savoir toi même. Tu ne vas pas, j’espère, recommencer un vaudeville ? Tu sais que je ne te flatte pas et que j’ai