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ici que j’ai des choses importantes à dire, et que je les aurais dites à temps si vous n’aviez pas violenté le temps. Je veux les dire, et je les dirai ; et, croyez-moi, il vaut mieux que je les dise pendant qu’on peut encore revenir sur la procédure. Cela vaut mieux encore pour les juges que pour le condamné ; car celui-là revit par l’honneur, au moment où les autres meurent par l’infamie.

— Témoin, dit le magistrat irrité, l’âcreté et l’insolence de votre langage seront plus nuisibles qu’avantageuses à l’accusé.

— Et qui vous dit que je sois favorable à l’accusé ? dit Patience d’une voix de tonnerre. Que savez-vous de moi ? Et s’il me plaît de faire qu’un arrêt illégal et sans force devienne un arrêt puissant et irrévocable ?

— Comment accorder ce désir de faire respecter les lois, dit le magistrat, véritablement ébranlé par l’ascendant de Patience, avec l’infraction que vous avez commise contre elles en ne vous rendant pas à l’assignation du lieutenant criminel ?

— Parce que je ne voulais pas.

— Il y a des peines sévères contre ceux dont la volonté ne s’accorde pas toujours avec les lois du royaume.

— Possible.

— Venez-vous avec l’intention de vous y soumettre aujourd’hui ?

— Je viens avec celle de vous les faire respecter.

— Je vous préviens que, si vous ne changez de ton, je vais vous faire conduire en prison.

— Je vous préviens que, si vous aimez la justice et si vous servez Dieu, vous m’entendrez et suspendrez l’exécution de l’arrêt. Il n’appartient pas à celui qui apporte la vérité de s’humilier devant ceux qui la cherchent. Mais, vous qui m’entendez, hommes du peuple, dont les grands