champs ! Sa mère était de même ; car, voyez-vous, j’ai connu sa mère toute jeune, comme elle est à présent, et la vôtre aussi, da ! Et c’était une maîtresse femme, charitable, juste. Et vous en tenez, à ce qu’on dit.
— Hélas ! non, répondis-je, saisi d’attendrissement par le discours de Patience. Je ne connais ni la charité ni la justice.
— Vous n’avez pu encore les pratiquer ; mais cela est écrit dans votre cœur, je le sais, moi. On dit que je suis sorcier, et je le suis un peu. Je connais un homme tout de suite. Vous souvenez-vous de ce que vous m’avez dit un jour sur la fougère de Validé ? Vous étiez avec Sylvain ; moi, j’étais avec Marcasse. Vous me dites qu’un honnête homme vengeait ses querelles lui-même. Et à propos, monsieur Mauprat, si vous n’êtes pas content des excuses que je vous ai faites à la tour Gazeau, il faut le dire. Voyez, il n’y a personne ici, et, tout vieux que je suis, j’ai encore le poignet aussi bon que vous ; nous pouvons nous allonger quelques bons coups, c’est le droit de nature ; et, quoique je n’approuve pas cela, je ne refuse jamais de donner réparation à qui la demande. Je sais qu’il y a des hommes qui mourraient de chagrin s’ils n’étaient pas vengés, et moi qui vous parle, il m’a fallu plus de cinquante ans pour oublier un affront que j’ai reçu… et, quand j’y pense encore, ma haine pour les nobles se réveille, et je me fais un crime d’avoir pu pardonner dans mon cœur à quelques-uns.
— Je suis pleinement satisfait, maître Patience, et je sens, au contraire, de l’amitié pour vous.
— Ah ! c’est que je gratte l’œil qui vous démange ! Bonne jeunesse ! Allons, Mauprat, du courage. Suivez les conseils de l’abbé, c’est un juste. Tâchez de plaire à votre cousine, c’est une étoile du firmament. Connaissez la