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vous soustraire aux poursuites de la justice. On pourrait faire rejaillir sur vous les accusations qui pèsent sur la conduite de vos oncles.

— Mes oncles ! dis-je en passant mes mains sur ma tête, est-ce un mauvais rêve que j’ai fait ? Où sont-ils ? Qu’est devenue la Roche-Mauprat ?

— La Roche-Mauprat a été préservée des flammes, répondit-il. Quelques bâtiments accessoires ont été détruits ; mais je me charge de réparer votre maison et de racheter votre fief aux créanciers dont il est aujourd’hui la proie. Quant à vos oncles… vous êtes probablement le seul héritier d’un nom qu’il vous appartient de réhabiliter.

— Le seul ! m’écriai-je. Quatre Mauprat ont succombé cette nuit ; mais les trois autres…

— Le cinquième, Gaucher, a péri dans sa fuite ; on l’a retrouvé ce matin noyé dans l’étang des Froids. On n’a retrouvé ni Jean ni Antoine ; mais le cheval de l’un et le manteau de l’autre, trouvés à peu de distance du lieu où gisait le cadavre de Gaucher, sont des indices sinistres de quelque événement semblable. Si l’un des Mauprat s’est échappé, c’est pour ne plus reparaître, car il n’y aurait plus d’espoir pour lui ; et, puisqu’ils ont attiré sur leur tête ces orages inévitables, mieux vaut pour eux et pour nous, qui avons le malheur de porter le même nom, qu’ils aient eu cette fin tragique les armes à la main que de subir une mort infâme au bout d’une potence. Acceptons ce que Dieu a décidé à leur égard. L’arrêt est rude. Sept hommes pleins de force et de jeunesse appelés, dans une seule nuit, à rendre un compte terrible !… Prions pour eux, Bernard, et, à force de bonnes œuvres, tâchons de réparer le mal qu’ils ont fait et d’enlever les taches qu’ils ont imprimées à notre écusson.

Ces dernières paroles résumaient tout le caractère du