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VIII


Nous avions fait une lieue environ dans les bois, nous arrêtant à chaque embranchement de route pour appeler ; car Edmée, convaincue que son père ne rentrerait pas chez lui sans l’avoir retrouvée, suppliait ses compagnons de voyage de l’aider à le rejoindre ; ce à quoi les gendarmes répugnaient beaucoup, craignant d’être surpris et attaqués par quelques groupes des fuyards de la Roche-Mauprat. Chemin faisant, ils nous apprirent que le repaire avait été conquis à la troisième attaque. Jusque-là, les assaillants avaient ménagé leurs forces. Le lieutenant de maréchaussée voulait qu’on s’emparât du donjon sans le détruire, et surtout des assiégés sans les tuer ; mais cela fut impossible à cause de la résistance désespérée qu’ils firent. Les assiégeants furent tellement maltraités à leur seconde tentative qu’ils n’avaient plus d’autre parti à prendre que le parti extrême ou la retraite. Le feu fut mis aux bâtiments d’enceinte, et, au troisième engagement, on ne ménagea plus rien. Deux Mauprat furent tués sur les débris de leur bastion ; les cinq autres disparurent. Six hommes furent dépêchés à leur poursuite d’un côté, six de l’autre ; car on avait trouvé sur-le-champ la trace des fugitifs, et ceux qui nous transmettaient ces détails avaient suivi de si près Laurent et Léonard qu’ils avaient atteint de plusieurs balles le premier de ces infortunés, à peu de