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je ne veux pas, en les cherchant, attirer sur Marianne l’attention des gens de la ferme.

Ils rentrèrent au salon, d’où Marichette s’était retirée, et ils attendirent encore un quart d’heure. Madame André était pleine de dépit et d’anxiété. Pierre était muet et comme brisé.

Enfin Marianne entra seule, un peu agitée, quoique souriante.

— Pardonnez-moi, ma bonne amie, dit-elle en embrassant madame André, je vous fais bien mal les honneurs de chez moi ; mais c’est votre faute. Pourquoi m’avez-vous amené un hôte si entreprenant ?

— Entreprenant ? dit Pierre avec une amertume ironique.

— Eh oui ! Il veut qu’au bout de trois heures je l’aime et lui promette de l’épouser. C’est un peu vite, convenez-en !

— Ce n’est pas trop vite, s’il a réussi à te décider.

— Je suis décidée ! dit Marianne.

— Alors, reprit Pierre navré, tu viens nous annoncer ton prochain mariage. Pourquoi n’est-il pas là pour nous dire son triomphe ?

— Oh ! il a le triomphe modeste ; il est parti.

— Il retourne seul à Dolmor ?

— Non, il retourne à Paris.

— Acheter les livrées ? dit madame André, qui entendait par là, comme les gens de campagne, les cadeaux de noces.

— Il les achètera sans doute bientôt pour une Parisienne, répondit Marianne, car il m’a déclaré en avoir assez des demoiselles de campagne.