Page:Sand - Malgretout.djvu/315

Cette page n’a pas encore été corrigée

pris de trouver mademoiselle d’Ortosa installée chez moi avec sa femme de chambre ; il n’y comprenait rien. Il ignorait combien j’avais à me plaindre d’elle, car dans ce cas son noble cœur eût compris tout de suite ; mais j’avais épargné à mon bien-aimé père la confidence de douleurs qu’il eût trop partagées. Il se contenta de savoir que la pauvre d’Ortosa était un peu repoussée de partout et qu’elle m’avait demandé asile. Il lui témoigna beaucoup d’égards, bien qu’elle ne lui fût pas sympathique.

Les premiers jours, elle se livra aux pratiques d’un catholicisme exalté, disant que la dévotion était son seul remède. Il était bon qu’elle se repentît, et, protestante, je n’avais pas le droit de lui dire qu’il y avait une bonne et une mauvaise manière de prier ; elle eût cru que j’y portais l’esprit de secte. Je la laissai faire et ne m’occupai que de sa santé ; mais bientôt elle m’avoua d’elle même que son mysticisme lui faisait plus de mal que de bien. Je la questionnai, je vis qu’elle n’était même pas catholique ; elle était superstitieuse et fataliste, un peu païenne, mauresque encore plus. Ses notions religieuses étaient frappées d’étroitesse et de démence comme ses notions sur le monde. J’essayai de redresser un peu son jugement, il ne me sembla pas qu’elle me comprît beaucoup ; mais elle était contente de trouver quelqu’un qui s’occupât d’elle sérieusement et patiemment, et elle m’é-