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présent que vous n’êtes pas un homme sérieux, ou que vous ne me prenez pas pour une personne respectable.

Nouville courba la tête et n’essaya pas de justifier Abel. Il avait une fort mauvaise opinion de mademoiselle d’Ortosa et la croyait hypocrite et galante dans toute la force du terme. Il avait soupçonné ses relations avec Abel et ne les jugeait point platoniques. Je dus la défendre dans le sens où elle pouvait être défendue, c’est-à-dire constater un grand empire sur elle-même pour faire le mal dans les limites que lui posait son ambition.

Nouville m’avoua qu’en me demandant une entrevue il avait encore eu l’espoir de sauver son ami de cette dernière épreuve ; mais, en apprenant le cruel plaisir que mademoiselle d’Ortosa s’était réservé de m’humilier, il comprenait que je ne pouvais plus m’exposer à de tels outrages, et il me jura qu’il le ferait comprendre à Abel d’une manière décisive et irrévocable. Je lui remis l’enveloppe qui contenait le brin d’herbe : c’était le sceau de la rupture.

Quinze jours après, il m’écrivit :

« Abel est parti pour l’Italie. Mademoiselle d’Ortosa est à Paris en train de conclure un grand mariage. Abel a beaucoup souffert de votre détermination, mais il l’a comprise. Oubliez-le, si vous pouvez, et, si vous pensez à lui quelquefois encore, pardonnez-lui dans votre cœur. Il expiera cruelle-