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car tout était jardin. La muraille marmoréenne qui fermait la gorge d’un côté et les bois qui tapissaient le flanc opposé, les vieilles souches, singulièrement tordues dans la pierre, les iris qui poussaient sur les appentis de chaume, les grands lierres qui soutenaient de leurs branches, devenues des câbles énormes, les roches bizarrement superposées, tout était frais, pur, brillant de force et gracieux de liberté. Les habitants avaient un air de bien-être et de bienveillance, Abel les connaissait déjà et semblait en être déjà aimé. Ils nous regardaient comme frère et sœur, et leur bon sourire nous bénissait. Nous allâmes voir dans les plis du rocher les carrières de marbre. Le rouge était beau d’aspect, mais peu compacte, et la plus grande partie servait à empierrer les chemins. Le noir était excellent et se débitait en blocs. Partout les ouvriers nous firent bon accueil. Abel, qui questionnait et causait amicalement, était pour eux dès l’abord un homme aimable et sérieux. Sans doute, je n’avais pas l’air d’une évaporée, et la souffrance que j’eusse pu éprouver de ma bizarre situation faisait place à un sentiment de confiance absolue. L’attitude exquise d’Abel auprès de moi m’assurait le respect de tous. Nous nous enfonçâmes dans la gorge, dont le chemin uni et sablé, bordé de marges fleuries, suivait gracieusement tous les contours sans quitter la rive embaumée du ruisseau. Les arbres fruitiers qui remplissaient les herbages com-