Page:Sand - Malgretout.djvu/266

Cette page n’a pas encore été corrigée

l’excitation de la surprise, de la joie et de la peur. Il est possible que ma sœur, ne pouvant me faire céder, me boude et me quitte ; mais cela ne pourra durer, elle ne saura pas se passer de moi, et je serai si douce, si patiente, je saurai lui rendre le retour si facile ! Vous m’aiderez, vous ! Elle n’est ni méchante ni folle. Cette crise s’apaisera, ce ne sera qu’un orage. Allons, espérons, soyons heureux de nous retrouver, et ne parlons plus d’entreprises romanesques et de luttes violentes.

Le rassérénement de mon esprit gagna Abel instantanément. Cette âme d’enfant était ouverte au bonheur et à la foi. L’épouvante lui était si peu naturelle qu’elle lui ôtait la raison. L’expansion était son état normal, nécessaire peut-être. Son front s’éclaircit, et l’éclatant sourire disparu la veille illumina ce visage si caressant et si radieusement bon.

— Oui, soyons heureux ! vivons ! s’écria-t-il en pressant mon bras contre son cœur palpitant, comme le soir de notre promenade dans le parc. Voyez comme il fait beau ! Quel lever de soleil après les bourrasques de cette nuit ! C’est la vérité qui nous parle et qui chante son hymne au-dessus des nuages. Ah ! j’ai envie de chanter aussi ; je voudrais courir, sauter par-dessus cette petite rivière en vous tenant dans mes bras, m’envoler avec les oiseaux, vous porter dans ces nuages roses que le soleil traverse ! N’est-ce pas que cette journée-ci