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m’accompagner, vous aviez peur que je ne mourusse d’ennui, si j’étais privée de votre conversation. Je l’ai acceptée pour ne pas vous désespérer, mais je vous ai dit que j’en venais chercher une meilleure. Donc, allez-vous-en voir le cirque de Revins ou les Dames de Meuse, et revenez me prendre ici dans deux heures.

Le petit jeune homme salua, remonta à cheval et disparut avec l’aisance d’un esclave rompu aux caprices d’une reine.

Je ne fis pas de réflexion à mademoiselle d’Ortosa sur cet incident, qui n’était nullement de mon goût. Je lui devais l’hospitalité de nos Ardennes françaises, et je l’invitai à la collation d’œufs frais, de laitage et de pain bis que l’on nous servait avec des soins de propreté fort appétissants. Elle s’écria que c’était charmant, mais qu’elle trouvait l’idylle un peu fade, et qu’elle avait pris ses précautions. Elle appela son domestique et lui fit tirer d’une valise de fer-blanc, qu’il avait portée en croupe, une bouteille de stout, un saucisson, deux perdrix froides et une fiole de café noir. Puis elle s’écria :

— Et le morceau de glace ? Ah ! c’est ce benêt de prince qui s’en était chargé. Il s’est plaint de ce que la boîte lui gelait les reins, et il l’emporte ! Quel écervelé ! — Courez après lui, attrapez-le, il nous faut absolument de la glace !

Le domestique courut et rapporta la caisse de métal où était la glace. Mademoiselle d’Ortosa