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— Il faut vous révéler, ma chère Sarah, ajouta ma sœur, qu’elles sont horriblement jalouses de nous à l’heure qu’il est, car je me suis amusée à faire savoir à quelques-unes que M. Abel et M. Nouville étaient venus chez nous, jouer pour nous seules, deux jours de suite. Le ton dont elles m’ont répondu : « Vous êtes bien heureuses ! » accusait un amer dépit.

— Vous devriez faire une exception à votre critique, dit mon père ; il n’y avait pas là que des provinciales.

— C’est vrai, il y avait la vieille lady Hosborn avec mademoiselle d’Ortosa. Elles sont arrivées à la seconde partie du concert seulement. Cela, c’est meilleur genre qu’il ne faut, selon moi.

Ma sœur se mit à parler de ces dames et à les railler. Si je vous rapporte ses paroles, c’est que les personnes en question, mademoiselle d’Ortosa surtout, que je ne connaissais alors que de vue, devaient bientôt jouer un rôle important dans notre existence.

Lady Hosborn et son fils Richard habitaient leur château du Francbois, situé dans les Ardennes luxembourgeoises, non loin de la frontière franco-belge, — non loin de Malgrétout par conséquent. Nous avions reçu, mon père et moi, une visite de lady Hosborn, nous l’avions rendue, et là s’étaient bornées nos relations. Il y avait une trop grande disproportion entre la richesse, le luxe et le bruit