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ville. Ils avaient laissé une lettre d excuses et d’adieux écrite par M. Nouville et signée d’Abel et de lui. Ils partiraient ensuite pour Bruxelles, et, s’ils pouvaient disposer de quelques heures, ils viendraient en repassant nous saluer, nous remercier de l’aimable hospitalité, etc. C’était une lettre toute de politesse, où je cherchai en vain quelque indice des sentiments particuliers d’Abel. Sa promesse de revenir bientôt était en contradiction avec ce qu’il avait dit en me quittant. La résolution de ne pas me revoir avant la fin de l’épreuve m’avait paru cruelle mais passionnée. Une nouvelle visite, quelque agréable qu’elle me fût, annonçait un rassérénement dans ses pensées, peut-être une résignation facile !

Vous le voyez, j’entrais dans la série d’agitations et d’angoisses que ma prudence avait provoquées. Adda fut souffrante ce jour-là, et mon pauvre père se reprocha de l’avoir grondée. Elle garda la chambre, apprit avec une indifférence apparente le départ des deux artistes, et ne reparla ni de l’un ni de l’autre.

Trois jours après, nous vîmes, dans les journaux de la localité, l’annonce du concert d’Abel et de Nouville. Mon père avait résolu d’y aller, et, au moment de partir, il me proposa de l’accompagner.

— Pourquoi n’irions-nous pas toutes deux ? dit Adda. Je me sens tout à fait guérie, et j’ai un énorme besoin de mouvement et de distraction.