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servilement d’abord, les plus merveilleuses fantaisies. C’était un enchaînement sans fin d’idées riantes et tristes, touchantes et fières, toujours originales, et passant, sans qu’on y prit garde, par les plus savantes modulations. Tout à coup, je ne sais comment, dans un moment ou l’ardeur du thème modifié et idéalisé semblait éclater comme un ouragan de puissance et de vitalité, je me trouvai auprès du piano, et, débarrassé de ma danseuse fatiguée, je tendais les deux mains à mademoiselle Merquem, qui, sans cesser de jouer, se levait à demi comme prête à me suivre ; mais elle se rassit, étonnée de sa propre distraction, en me demandant ce que je voulais.

— Vous faire danser, répondis-je. Le génie de la vie est en vous, vous devez danser comme le vent et comme la flamme.

Elle me regarda d’un air étonné, comme on regarde un fou que l’on avait cru raisonnable.

— Je ne danse jamais, répondit-elle en jouant toujours.

— Pourquoi ?

— J’aime à voir danser, cela me suffit.

— Elle ment, me cria dans l’oreille la grosse voix de Montroger. Elle danse comme les sylphes, elle dansait du moins…

Jadis ! reprit mademoiselle Merquem d’un air moqueur et enjoué ; mais vous, pourquoi ne faites-vous pas sauter ces demoiselles, qui manquent de cavaliers ?

— Est-ce que vous l’exigez ?

— Ce serait une bonne action, et vous y manqueriez ?

Montroger alla, sans répliquer, inviter mademoi-