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me séduire et que vous n’auriez pas de prétexte convenable pour lui chercher querelle.

La correspondance était effectivement irréprochable de part et d’autre. La jeune fille était fière et chaste, et trop habile pour avoir donné prise sur elle. Montroger lui exprimait sa reconnaissance en termes respectueux qu’il eût voulu en vain rendre énergiques ou tendres. Il ne savait guère écrire, et, craignant d’en trop dire, il n’en disait peut-être pas assez pour peindre le sentiment qu’Erneste lui attribuait.

— Il résulte de tout cela, lui dit sa mère, que tu as fait un rêve et que le comte persiste à aimer mademoiselle Merquem. Je ne comprends pas que tu manques de dignité au point de vouloir lutter contre un souvenir si obstiné !

— C’est là précisément ce qui me plaît et m’intéresse, répondit Erneste. J’ai voulu triompher de ce souvenir, et j’ai réussi.

— Comment le sais-tu ? Il te l’a dit ?

— Il s’en est bien gardé ! Il savait parfaitement qu’au premier mot d’amour, il serait chassé. À présent que je le congédie tout naturellement, — car j’espère que ma missive d’hier soir va être replacée dans l’arbre, — il va s’ennuyer, et vous le verrez arriver avant la fin de la semaine.

— Tu sais que c’est un refus qu’il viendrait chercher ?

— Pourquoi, maman ? Dites, et soyez nette, puisque je sais tout.

— Eh bien, je serai très-nette. En supposant que la conduite de Montroger envers mademoiselle Merquem eût été irréprochable, je n’estime pas un homme qui