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à mon entourage, j’ai aussi le droit d’avoir des affaires à Paris…

— Mais notre mariage ? Ignorez vous qu’il est impossible de le cacher ?

— Je ne l’ignore pas. Nous ne pouvons contracter qu’un mariage irrégulier, sur lequel il faudra revenir plus tard pour le rendre légal. Nous irons en Italie, où une formalité religieuse est en même temps un engagement civil. Partout l’honneur est lié par un serment de bonne foi, que ce soit un magistrat ou un prêtre qui le reçoive. Partout il faut des publications de bans ; à Rome, où tout s’achète, nous en serons dispensés moyennant finance.

— Un mariage ainsi contracté me répugne. Je suis philosophe et vous êtes déiste. Irons-nous confier le plus pur élan de notre passion, le serment, cette chose sacrée, à une bénédiction vénale qui ne rougirait pas de tricher sa propre légalité ?

Elle ne me répondit pas et ne parut pas entendre les développements que je donnais à ma pensée. Était-elle inquiète ou blessée de mes scrupules ? Sa figure n’exprimait que la réflexion, mais comme si elle eût écouté une voix intérieure.

— À quoi songez-vous, Célie ? lui dis-je. Vous semblez ne plus m’entendre !

— Je vous ai entendu, répondit-elle, je n’ai écouté que vous. Est-ce que j’ai à présent un autre cerveau, une autre conscience que les vôtres ? Oui, je le vois bien, Bellac n’est pas assez pratique, et j’aurai quelque peine à le devenir ; mais à quoi bon le deviendrai-je, puisque vous l’êtes ? Je verrai par vos yeux et il ne me sera pas difficile d’agir en conséquence. Donc, nous ne pouvons pas plus nous marier en secret