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nous arrivâmes les premiers au but. Là, nous reconnûmes Célio Barcot sur un rocher que la mer battait avec furie en poussant contre ses flancs à pic les débris d’une petite barque complétement brisée.

Réfugié sur le plus haut de cet écueil que couvrait le flot à marée haute, le pauvre enfant tendait les bras vers nous avec détresse, tandis qu’un homme habillé comme lui en marinier, mais qui paraissait plus robuste et de sang-froid, soutenait dans ses bras un compagnon défaillant, presque évanoui.

Quelques instants de plus, et la position de ces naufragés était désespérée. En nous voyant approcher autant que possible et leur jeter les cordes, ils n’hésitèrent pas à se mettre à la mer, Célio Barcot le premier, l’autre en poussant et soutenant avec une grande énergie son camarade demi-mort de fatigue ou de peur ; mais, comme celui-ci ne s’aidait nullement, tous deux eussent péri sans l’expédient auquel on eut recours sur notre barque. On s’empara du petit mât de la barque brisée, et, le butant contre le rocher, on en fit un pont sur lequel l’homme valide mit l’homme malade à califourchon, en le poussant par derrière et en soulevant le mât pour faire glisser jusqu’à nous le pâle chevaucheur de cet engin de salut. La chose me parut ingénieuse et facile au premier abord ; mais le flot qui fouettait sur l’étranger courageux lui disputait brutalement le bout du mât, et il lui fallait le lâcher pour qu’il ne fût pas brisé comme une paille.

De notre côté, nous faisions sur le flot une danse échevelée, et il fallait aviser à ne pas nous laisser briser contre le roc. Je compris que le danger était sérieux en voyant le père Guillaume saisir les anneaux