Page:Sand - Mademoiselle La Quintinie.djvu/355

Cette page n’a pas encore été corrigée

qu’il avait eu sur lui. Il parla à Émile de son père avec beaucoup d’affection, lui apprit avec réserve que M. Lemontier avait levé tous ses scrupules, et, quand le général vint les rejoindre, sanglé dans son uniforme, Moreali s’éclipsa et ne reparut plus. M. La Quintinie alors ouvrit les bras à Émile en lui disant :

« Voyons, enfant du diable ! vous l’emportez ! Soyez un bon diable. Embrassez-moi, aimez-moi un peu, ne me prenez pas pour une ganache quand je vous ferai la morale, et rendez ma fille heureuse. »

Émile l’embrassa avec effusion, car il sentit en lui, sinon la force, du moins le besoin et l’instinct de la bonté. Il lui demanda s’il ne viendrait pas apporter son pardon et son consentement à Lucie. Le général répondit que c’était impossible, mais qu’il ne tarderait pas, et, peu à peu entraîné par une réaction de condescendance extraordinaire, il lui permit d’aller à Turdy et d’y retourner passer chaque mois deux ou trois jours jusqu’à l’expiration du terme fixé, disait-il, par Lucie.

Émile écrivait le jour même à son père :

. . . . . . . . . . . . . . .

« J’ignore si c’est bien Lucie qui a proposé ce délai ; mais, fût-il plus long, fût-il de plusieurs années, je m’y soumettrais, si le conseil venait de toi. Dieu merci, tu n’es pas si exigeant !

« Le général m’a fait déjeuner avec lui et m’a fait promettre de revenir passer la soirée. Il veut me présenter à son entourage officiel, non comme son futur gendre, mais comme un jeune homme qui l’intéresse et dont il fait cas. « Ça servira pour plus tard, » a-t-il dit. « Quand j’aurai à déclarer mon alliance avec la philosophie, on sera moins étonné. Promettez-moi d’être aimable ce soir. Tâchez de plaire à tout le monde ! » Et, prenant le ton enjoué et dégagé : « Vous verrez bien