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civile, quelle qu’elle fût, car vous la contraindriez à cette mesure de prudence en soulevant l’émeute du fanatisme autour des sanctuaires nouveaux.

« À quelque Église que nous appartenions, nous ne sommes donc pas libres de la fonder et de la manifester, et le reproche que vous nous adressez est l’équivalent de cette naïveté d’un prédicateur étranger qui disait : « La preuve que le divorce choque les mœurs, c’est qu’on n’en a pas vu un seul cas depuis qu’il est supprimé. »

« Nous ne nous tenons donc pas pour convaincus de manquer de religion. Nous croyons être, au contraire, en grand travail de cœur et d’esprit pour poser les formules de la nôtre dans le silence auquel on nous condamne, et, si nous ne pouvons écrire et parler, nous ne sommes point effrayés de ce recueillement forcé où s’élaborent la science de Dieu et la vie de l’Église future.

« Permettez-moi donc de vous parler comme un homme religieux à un homme religieux ; je dirai plus, comme un prêtre à un autre prêtre ; car je vous déclare, sans orgueil, que j’ai voué ma vie à la recherche de l’idéal divin, et que j’ai travaillé tout autant que vous à me rendre digne de cette mission. C’est pourquoi il vous faut dépouiller un instant l’orgueil du prêtre catholique et m’écouter comme un véritable chrétien écoute son frère et son égal.

« Je crois fermement que vous êtes dans l’erreur, ce qui ne m’empêche pas de respecter votre caractère, votre personne, votre vie, vos biens, vos symboles, vos temples, vos livres, vos monastères, vos prédications, tout ce qui manifeste votre croyance sincère. Si la même liberté, protectrice du droit de tous, est assurée à tous, votre erreur ne m’offense, ne m’inquiète, ni ne m’afflige. Elle durera ce que durent les erreurs, longtemps peut-être encore, mais pas assez pour produire les mauvais