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Elle releva son voile, et je vis sa figure inondée de larmes.

« Nul autre que vous ! dit-elle ; si vous me repoussez, je suis perdue, damnée à jamais. Votre devoir est de me réconcilier avec Dieu, ou mon éternel malheur pèsera sur votre conscience. »

Je dus céder et promettre. Le lendemain, à l’heure dite, j’étais chez son amie, qui nous laissa seuls dans un salon réservé.

« Avant que je vous demande d’entendre ma confession, dit madame La Quintinie, j’ai à vous raconter l’histoire de mon mariage, et je serai forcée de vous parler des personnes qui m’entourent. Cela est permis dans un entretien amical. Écoutez-moi. Je n’ai jamais aimé M. La Quintinie depuis le premier jour où vous m’avez démontré que je ne pouvais ni ne devais aimer un incrédule. Il y a de cela deux ans. À partir de cette époque, j’en ai aimé un autre ; mais je ne m’en suis pas accusée en confession, ce ne pouvait pas être un péché ; c’était une sainte amitié qui ne pouvait aboutir au mariage. J’avais donc l’esprit tranquille et le cœur rempli ; la preuve, c’est que l’idée de me consacrer à la virginité m’était douce, et que mon père m’a désespérée en s’y opposant.

« Quand j’ai dû renoncer à vaincre sa résistance, il s’est passé en moi des choses étranges dont je me confesserai ailleurs qu’ici. J’ai cru devoir lutter contre moi-même, obéir à mon père et m’efforcer d’aimer M. La Quintinie. Je n’étais pas forcée de me prononcer pour ce dernier ; au contraire, mes parents me priaient d’attendre et de réfléchir, mon père parce qu’il trouvait le colonel frivole et inintelligent, ma mère parce qu’elle le voyait impie.

« Pourquoi me suis-je obstinée à le choisir ? Parce