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XV.

LUCIE À MOREALI.


Turdy, le 13 juin.

Mon ami, vous êtes bien bon pour moi d’avoir écrit cette longue lettre et transcrit ou plutôt traduit la doctrine du père Onorio pour les besoins de mon âme. Je ne sais si ce vénérable religieux est aussi éloquent que vous le faites. Peut-être prêtez-vous à ses idées le secours de votre propre éloquence. N’importe, je ne veux examiner que la doctrine elle-même.

Elle n’est pas nouvelle, c’est celle du beau livre de l’Imitation de Jésus-Christ, qui est considérée par l’Église comme l’introduction à la sainteté ; mais peut-être avons-nous le droit de croire que ces sortes de travaux inspirés sont appropriés au temps où ils éclosent, et qu’ils nous tracent une ligne de conduite peu à peu impossible à suivre, sinon dangereuse et contraire aux progrès de la foi. Est-ce que la foi, est-ce que la notion et l’amour de Dieu ne doivent pas suivre la marche de l’esprit humain de siècle en siècle et se mettre à la tête de toutes les conquêtes, au lieu de se faire traîner ou de protester ?

Ceci nous mènerait bien loin et ne serait que la paraphrase d’une de ces excellentes leçons que vous oubliez, que vous reniez peut-être, mais que j’ai gardées en extraits et en résumés dans mes cahiers du couvent. Cette leçon était intitulée E pur si muove ! Souvenez-vous, mon ami ! Vous nous disiez (et je vous cite à peu près textuellement, car j’ai mon extrait sous les yeux) :