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— Parles-en à Jeanne, me dit-elle ; moi, j’y mettrais malgré moi trop de solennité, elle prendrait peur ; tu peux, toi, lui parler gaiement et légèrement. Tu verras si elle est véritablement résolue au célibat.

J’agis en conséquence. Jeanne ne parut pas m’entendre et me parla d’autre chose ; j’y revins quelques heures plus tard.

— Ah ! bien, me dit-elle, tu tiens à ce que je pense à ton ami ! il est très-bien élevé et sa figure est sympathique. Tu peux lui dire qu’il me plaît beaucoup.

— Tu as une manière de dire les choses… Est-ce pour te moquer ?

— Non, je crois qu’il mérite l’estime et l’amitié que tu as pour lui ; mais moi, tu le sais, les personnes me sont indifférentes. Je n’aime que la musique.

— Alors tu n’aimes que ton vieux professeur, c’est lui que tu épouseras ?

— Non, il est marié et il sent mauvais ; mais je n’ai besoin d’épouser personne, moi ! mon amour n’est pas de ce monde.

— Songes-tu encore à prendre le voile ?

— Non, je tiens à garder mes cheveux.

— Tu n’es plus dévote ?

— Je suis mieux que cela, je suis chrétienne.

— Je suis chrétien aussi… Me damnes-tu encore ?