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embrassait tout l’horizon des Pyrénées, elle avait deux issues, l’une sur le chemin de la ville, l’autre sur les champs, où serpentait un sentier assez difficile. Je ne le prenais jamais. Je le pris ce jour-là, craignant d’arriver trop tôt et de gêner ma mère dans ses occupations domestiques.

La nuit était très-sombre ; au moment où j’approchais de la petite porte, j’en vis sortir un homme qui fit deux ou trois pas vers moi, se retourna aussitôt, marcha plus vite en sens contraire et se perdit dans l’obscurité. Je me hâtai et trouvai entr’ouverte la porte ordinairement fermée le soir. Je pénétrai dans notre jardin, j’y trouvai Jeanne qui marchait lentement et comme absorbée dans ses rêveries.

— Qui donc vient de sortir ? lui dis-je.

— Je ne sais pas, répondit-elle, je n’ai fait attention à rien.

— Tu étais donc bien préoccupée ? Un homme a dû passer près de toi. Le jardin n’est pas assez grand pour que tu ne l’aies pas vu ! Il vient de sortir à l’instant !

— Tu l’as rencontré ? Était-ce le jardinier ?

— Je l’ai mal vu, il m’évitait ; mais il n’avait pas l’allure d’un jardinier. D’ailleurs… je me rappelle, le jardinier qui vient donner une façon de temps en