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parler. Je me suis rendu à ses ordres, et elle m’a dit des choses qu’elle se réserve de te dire elle-même.

— Mais quoi ? Jeanne a-t-elle disposé de son avenir ?

— Jeanne est un ange, et je suis ton meilleur ami. Voilà l’explication dont il faut te contenter jusqu’à nouvel ordre. Elle se porte bien, elle est plus belle que jamais. Ta mère aussi est belle et bonne, et vraie ; sois digne de toutes deux ! Je crains que tu n’aies fait quelque folie. Tu te dis malheureux, voyons, parle vite. Il est très-important que tu ne me caches rien. Veux-tu me le promettre ?

— Je jure de te dire tout.

Je lui racontai dans les moindres détails tout ce qui s’était passé entre Manuela, M. Brudnel et moi. Il m’écouta très-attentivement, et, quand j’arrivai à cette conclusion que la vie de Manuela me semblait menacée par mon amour :

— Assez ; me dit-il ; je m’attendais à cela. Je t’ai suivi en ami et en médecin : or, le médecin te déclare que tu dois rompre à jamais avec Manuela parce que l’effusion la tuera ; l’ami te prescrit la même chose, parce que la position est impossible. Tu ne peux supporter la rivalité avec M. Brudnel. Quelque innocente que son intimité avec Manuela puisse paraître aux gens désintéressés, pour un amant comme pour un mari,