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— Eh bien, si M. Brudnel est digne en tout point de la passion qu’il vous inspire, je ne suis pas aussi persuadé que vous que vous ayez fait tout votre possible pour lui en inspirer une semblable. Certainement vous êtes aimable et douce ; certainement vous méritez l’approbation pour avoir vaincu en vous des instincts qui faisaient taire la prudence et la fierté. Puisque vous avez pu faire cet effort, le plus difficile de tous, pourquoi n’avoir pas fait celui de former votre esprit pour devenir, je ne dis pas l’égale de M. Brudnel, il a une intelligence de premier ordre, mais sa véritable compagne, une amie assez éclairée pour tout comprendre et pour causer à toute heure avec lui ? Je vous ai peu observée, mais pourtant je vous ai assez vue pour être certain de votre indolence, de votre lâcheté, j’oserai dire, en face de tout travail soutenu. Vous vous dites faible d’esprit et sans mémoire, quelquefois vous allez jusqu’à vous dire inintelligente, et le pis de la chose, c’est que vous ne le dites pas avec honte ou regret, vous en faites une plaisanterie, une vanterie, une sorte de bravade. Cela est de mauvais goût, je vous en avertis. Vous semblez dire aux gens : « Tenez, je suis ignorante et bornée, admirez-moi quand même, je suis si belle ! Aimez-moi, je suis si séduisante ! » Eh bien, selon moi, quand une