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cœur mort ou vivant selon que le sien s’éteignait ou se ranimait. Quand il me vit et me reconnut, il parut heureux, et le premier mot qu’il put dire fut pour me bénir et me remercier.

» À peine guéri, il voulut quitter Londres et retourner en Italie. À partir de cette maladie, je devins véritablement nécessaire à mon ami. Il ne me parla plus jamais de me marier avec un autre, et il me renouvela souvent une promesse que je n’exigeais pas, celle de m’épouser le jour où il serait libre. Notre intimité n’avait pu rester cachée, et, comme on aime mieux croire aux apparences que de s’assurer de la réalité, ce qui, je l’avoue, est moins facile, je passais pour la maîtresse de M. Brudnel. Je m’y résignai, j’avais tout accepté pour l’amour de lui, mais il ne put souffrir que je fusse calomniée et méprisée pour mon dévouement. Il fit entendre que nous étions mariés. On ne le crut pas dans son monde, car sa sœur dut être informée de la vérité, et elle ne se fit pas faute de dire que j’étais une fantaisie sans conséquence ; mais, du moins dans la vie errante que nous menons et vis-à-vis des gens qui nous entourent, je n’ai pas la souffrance d’être regardée avec mépris. Si les hôteliers qui nous reçoivent, les amis que sir Richard rencontre, les domestiques qui nous servent