Page:Sand - Lettres a Alfred de Musset et a Sainte-Beuve.djvu/44

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
XXVIII
INTRODUCTION

c’est ta vocation, mon ami. Monte vers Dieu sur les rayons de ton génie, et envoie ta muse sur la terre raconter aux hommes les mystères de l’amour et de la foi[1]… » — Presque toute la lettre est emportée du même souffle.

Et lui, que dit-il, de son côté ?

« Sois fière, mon grand et brave George ; tu as fait un homme d’un enfant… Qu’étais-je donc sans toi, mon amour ? Regarde où tu m’a pris, et où tu m’as laissé… Suis ton passage dans ma vie… Regarde comme tout cela est palpable, évident, comme tu m’as dit clairement : Ce n’est pas là ton chemin[2], comme tu m’as pris par la main pour me remettre dans ma route… Songe à cela : je n’ai que toi. J’ai tant nié, tant blasphémé, je doute de tout, hormis de toi. »

« Qu’ai-je fait de ma jeunesse ? Qu’ai-je fait même de notre amour ? Vainement j’ai pleuré une ou deux fois dans tes bras. Que sais-tu de moi, toi que j’ai possédée ? C’est toi qui as parlé ; c’est toi dont la pitié céleste m’a couvert de larmes… Il y avait en moi deux hommes, tu me l’as dit souvent, Octave et Cœlio. J’ai senti, en te voyant, que le pre-

  1. Voir plus loin, lettre VITI.
  2. Mariéton, p. 163-164.