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les sept cordes de la lyre

flamboient, ils ruissellent sur son beau corps comme une cascade embrasée des feux du soleil. Ô Hélène ! que vous êtes belle ainsi ! Mais vous ne m’entendez pas !

ALBERTUS. Hanz, mon fils, ne la regardez pas trop. Il y a dans la vie humaine des mystères que nous n’avons pas encore abordés, et que je ne soupçonnais pas, il y a un instant. (À part.) Oh ! moi aussi, je me sens troublé, je voudrais ne pas voir cette sibylle !

HÉLÈNE, elle soutient la lyre d’une main et lève l’autre vers le ciel. Voici ! le mystère s’accomplit. La vie est courte, mais elle est pleine ! L’homme n’a qu’un jour, mais ce jour est l’aurore de l’éternité ! (La lyre résonne magnifiquement.)

HANZ. Ô muse ! ô belle inspirée !

CARL. Quelle mélodie céleste ! quel hymne admirable ! Mes oreilles n’ont jamais entendu rien de pareil, et moi, insensible d’ordinaire à la musique, je sens mes yeux se remplir de larmes, et mon esprit aborder des régions inconnues.

ALBERTUS, baissant la voix. Taisez-vous, parlez-bas, du moins. Observez le prodige. Il y a ici beaucoup à apprendre. Ne voyez-vous pas que ses mains ne sont pas posées sur la lyre ? Son bras gauche seul soutient l’instrument appuyé sur son sein, et, comme si les pulsations de son cœur brûlant, comme si un souffle divin émanant d’elle suffisaient à faire vibrer les cordes, sans le secours d’aucun art humain, la lyre chante sur un mode inconnu quelque chose d’étrange.

HANZ. Oh ! oui, je vois le miracle ! Je savais bien que cette créature appartenait à un monde supérieur ! Laissez-moi l’écouter, maître, elle n’a pas fini. Dieu !