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lettres à marcie

éviter le scandale des chutes ou pour cacher le désespoir des regrets.

Il ne m’appartient pas d’examiner une question aussi grave que serait celle de la nécessité de ce vœu chez le prêtre. Pour ma part, j’y ai toujours cru, même dans les plus superbes jours d’examen et de doute ; mais, outre que je n’oserais rien trancher à cet égard, il n’importe aucunement à notre sujet. Vous voulez disposer de votre sort par un vœu séculier, en dehors d’une religion formulée. Je crois que la chose n’est ni utile ni possible. Permettez-moi d’ailleurs de vous dire, Marcie, que ces volontés extrêmes, ces aveugles élans vers un but auquel il na faudrait songer qu’en frissonnant, ne sont pas la marque certaine d’une véritable guérison. Ce sont des rayons de soleil vers la fin de l’orage, des fleurs épanouies aux approches du printemps. Mais il y aura encore des bourrasques terribles, il y aura de sombres nuits d’hiver. Tenez-vous en garde contre ces réactions, vous ne les éviterez pas ; sachez les supporter sans désespoir de voir renaître le calme et recommencer l’été. Combien ne seriez-vous pas troublée et épouvantée si de nouvelles crises survenaient après un serment où votre conscience et votre raison se trouveraient engagées au delà de vos forces ! Ne jurez pas, Marcie, ne jurez pas ! Le destin peut sourire et la vie venir comme une coupe de miel s’offrir à vos lèvres pures. Aliéner la liberté de répondre aux secrets desseins d’une Providence dont vous n’avez pas le droit de douter, ce serait presque un crime. Je ne vous ai cité l’exemple d’Arpalice que pour vous montrer quelles douceurs peut offrir le célibat quand on a de fortes raisons pour s’y dévouer ; mais ces raisons