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les sept cordes de la lyre

— Chère Hélène, si vous m’entendez, répondez-moi, ne fût-ce que par un regard. Votre silence m’inquiète, votre indifférence m’afflige. (Hélène le regarde avec étonnement, et reporte les yeux sur la campagne.)

albertus. Elle m’entend cependant, mais il semble que mes paroles n’aient aucun sens pour elle. Peut-être, si je lui montrais la lyre, retrouverait-elle la mémoire. (Il prend la lyre et la pose sur la fenêtre. Hélène la regarde avec indifférence.)

albertus. Allons ! sa raison est entièrement perdue, il faut un miracle pour la ressusciter. Si je suis dupe d’une grossière imposture, pardonnez-moi, ô vérité ! ô Dieu !… Pour la première fois, je vais avoir recours à autre chose que la certitude. (Il essaye la lyre, qui reste muette.)

méphistophélès, à part. Malédiction sur toi, pédagogue incurable ! Tu ne peux pas seulement faire résonner la corde de l’amour ! Qui donc brisera la lyre ? Allons chercher Hanz ou Wilhelm. Peut-être seront-ils moins encroûtés. Que m’importe, au reste, qui ce soit ? La pureté d’Hélène ne peut résister au charme de la corde d’airain, et, qu’elle soit souillée par le philosophe ou par toute la ville, il faudra bien que l’Esprit de la lyre s’humilie, et que le philosophe se damne ! (Il s’envole.)


Scène III. — HÉLÈNE, ALBERTUS.

albertus, consterné. Tous mes efforts sont vains ! Elle est muette pour moi, muette comme Hélène, muette comme moi-même ! Et pourtant mon âme est pleine d’ardeur et de conviction ! D’où vient donc