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les sept cordes de la lyre

vous arriverait pas si vous connaissiez la musique ; mais vous ne tarderez pas à la savoir, car je vous trouve dans de meilleures idées. Il me semble que vous commencez à ouvrir les yeux et à reconnaître que vous devez tâter le pouls à la vie si vous voulez être le vrai médecin de l’humanité.

albertus, à part. Cet homme me déplaît ; je me méfie de lui, et pourtant il me mène où il veut ? D’où vient que sa visite m’est agréable en cet instant ? Serait-ce que j’ai besoin d’une plus mauvaise conscience que la mienne pour m’encourager dans le mal ?

méphistophélès. Ne seriez-vous pas moine, par hasard ?

albertus. Rien ne peut me déplaire à un plus haut point que cette plaisanterie. Que voulez-vous dire ?

méphistophélès. C’est que vous appelez crime tout ce qui est en dehors de votre morale personnelle.

albertus. S’il en est ainsi, n’ai-je pas raison pour moi du moins ? Tout est relatif.

méphistophélès. Je m’exprime mal… Je devrais dire : vœux insensés, orgueil téméraire.

albertus. Ce reproche est un lieu commun. Vous qui prétendez lire au dedans de moi, vous devriez savoir que mon renoncement aux choses humaines est une résolution naïve et consciencieuse.

méphistophélès. Comme il vous plaira ; j’aimerais mieux passer pour un orgueilleux que pour un niais.

albertus. Le mépris et l’ironie ne me touchent point.

méphistophélès. Cela veut dire que vous êtes blessé. Allons ! ne nous fâchons pas. Depuis vingt-cinq