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si vous ne pouvez le nier que par un mensonge… vous aurez mon mépris et mon oubli !

— Sa mère ? moi, sa mère ? s’écria Brulette en se relevant comme pour repousser Charlot. Vous croyez que je suis sa mère ? dit-elle encore, en reprenant contre son cœur le pauvre enfant, cause de tant de soucis. Alors elle regarda d’un air égaré autour d’elle, et, cherchant Huriel des yeux : Est-il possible, s’écria-t-elle, que l’on pense de moi une pareille chose ?

— La preuve qu’on ne le pense pas, répondit Huriel en s’approchant d’elle et en caressant Charlot, c’est qu’on aime l’enfant que vous aimez.

— Dites mieux, mon frère, s’écria vivement Thérence, dites ce que vous me disiez hier : « Qu’il soit à elle ou non, il sera mien si elle veut être mienne. »

Brulette jeta ses deux bras au cou d’Huriel, et s’y tenant attachée comme une vigne à un chêne :

— Soyez donc mon maître, dit-elle, car je n’en ai jamais eu et n’en aurai jamais d’autre que vous.

Joseph regardait cet accord soudain dont il était la cause, avec une douleur et un regret si grands, qu’il faisait peine à voir. Le cri de vérité de Brulette l’avait saisi, et il croyait avoir rêvé l’offense qu’il venait de lui faire. Il sentit que tout était fini entre eux, et, sans dire une parole, il ramassa sa musette et s’enfuit.

Le grand bûcheux courut après lui et le ramena, disant :

— Non, non, ce n’est pas comme cela qu’il faut se quitter, après une amitié d’enfance. Abaisse ton orgueil, Joseph, et demande pardon à cette honnête fille. C’est ma fille, à cette heure, l’accord en est fait, et j’en suis fier ; mais il faut qu’elle reste ta sœur. On pardonne à un frère ce qu’on ne peut pardonner à un amant.

— Qu’elle me pardonne si elle veut et si elle peut ! dit Joseph ; mais si je suis coupable, je ne peux recevoir