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peut-être qu’il vous connaît mieux, ma Thérence, et que…

— Non, non, dit résolument la fille des bois : si ce n’est par dépit contre votre indifférence, c’est alors par dépit contre ma guérison. Il ne ferait donc cas de moi que parce que je n’en fais plus assez de lui ! Si c’est là son amour, ce ne serait pas le mien, Brulette ! Tout ou rien ; oui pour la vie en toute franchise, ou non pour la vie en toute liberté !

» Mais voilà cet enfant qui s’éveille, et je vous veux emmener à ma demeurance du moment, qui est ce vieux château du Chassin.

— Ne nous direz-vous, au moins, fit Brulette, bien intriguée de tout ce qu’elle apprenait, comment et pourquoi vous êtes dans le pays d’ici ?

— Vous êtes trop pressée de savoir, répondit Thérence ; soyez-le donc un peu plus de voir !

Et la prenant par le cou avec son beau bras nu, tout brun du soleil, elle l’emmena sans lui donner le temps de ramasser Charlot, qu’elle prit comme un chebrilion sous son autre bras, encore qu’il fût déjà lourd comme un petit bœuf.

Le fief du Chassin a été un château, j’ai ouï dire, avec justice et droits seigneuriaux ; mais, dans ce temps-là, il n’en restait déjà plus que le porche qui est une pièce de conséquence, lourdement bâtie, et si épaisse qu’il y a des chambres logeables dans les côtés. Il me paraîtrait même que la bâtisse que je vous nomme un porche, et dont l’usage n’est guère facile à expliquer à présent (de la manière qu’il est construit), était une voûte servant d’entrée à d’autres bâtiments ; car, de ceux qui restent autour du préau et qui ne sont que mauvaises étables et granges délabrées, je ne sais quelle défense on aurait pu tirer, ni quelles aises on eût pu s’y donner. Il y avait encore cependant, à l’heure que je vous raconte, trois ou quatre chambres dégarnies qui paraissaient anciennes ; mais si jamais gros seigneurs