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maudissements ! toujours et puis encore ! en veux-tu, en voilà ! Ah ! les femmes honnêtes, ça a du feu au bout de la langue ! (À Blanchon.) Voyons, qué que tu fais là comme une pierre ? Faut s’en aller d’ici.

TOINET.

Jean, mon papa te dit de l’attendre là ; il va venir te parler, quand tes camarades seront partis.

JEAN.

C’est bien, mon garçon, on attendra. Apporte-moi du bran-de-vin et bourre-moi ma pipe. (Toinet prend la pipe et sort.) Faut boire !… j’ai pas encore bu aujourd’hui, et je me sens plus faible et plus sot qu’un enfant.

BLANCHON.

Moi, quand j’ai vu pleurer comme ça la Gervaise, ça m’a fait quelque chose.

JEAN.

Bah ! les femmes, ça pleure à volonté. (Toinet rentre et pose une bouteille, un verre et la pipe de Jean sur la table.) Merci, petit.

TOINET.

Je veux pas de vos remercîments.

JEAN.

Ah ! qu’est-ce que t’as, toi ?

TOINET.

Ce que j’ai ? Je m’en veux de t’avoir donné ce bouquet. T’as fait de la peine à mon père et à ma sœur… et je ne vous aime plus. (Il arrache le ruban et le bouquet de la boutonnière de Jean.)

JEAN.

Tiens ! tiens ! tiens ! voyez-vous ça ? Alors, on va se battre tous les deux.

TOINET.

Attendez que je sois fort et vous verrez ! faudra pas vous moquer de moi, car je vous tuerai, moi ! vous verrez ça, grand lâche ! (Il sort.)