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JEANNE.

Et elle l’a trouvé tout à fait à son goût, la pauvre mignonne ! et puis l’amitié d’enfance ! Mêmement qu’elle a poussé la fenêtre malgré moi, pour voir s’il la regarderait. Mais lui, s’il l’a vue, il ne l’a point reconnue, et elle en a eu tant de peine, qu’elle en a pleuré tout le temps qu’on a marché pour revenir chez nous.

JEAN.

Alors, je comprends pourquoi vous voilà ; vous craignez qu’elle n’y pense trop et vous voulez pouvoir lui dire qu’il n’est plus gentil du tout ?

JEANNE.

Sans doute, et c’est à vous que je demande la chose, puisqu’on dit que c’est vous qui l’avez perdu, ce garçon.

JEAN.

Eh bien, que ça soit moi ou non, il l’est, et je ne veux pas qu’il épouse Mariette.

BLANCHON, à part.

Je veux pas non plus…

JEAN l’aperçoit et lui fait signe de rester caché. À part.

Enfin, le voilà ! (Haut.) À quoi songez-vous, Jeanne ? Voyons, venez vous rafraîchir chez Germinet. Il n’y a personne, et, par la chaleur qu’il fait…

JEANNE.

Non, je songe à m’en retourner, Jean. Vous avez eu grand tort de mettre le fiancé de votre sœur dans le mauvais chemin.

JEAN.

Possible ! mais la chose est faite. (Avec intention.) Et si on parlait mariage à Blanchon, ça ne le charmerait point du tout, allez ! (Raillant.) C’est un homme à bonnes fortunes, à c’te heure !

BLANCHON, à part.

Ah ! mais oui !

JEANNE.

Qui sait ? Peut-être que des bons conseils le ramèneraient. Je veux le voir.