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aimaient à causer ensemble. Michelin n’avait pas de secrets pour Ambroise. Probablement Espérance n’en avait pas non plus. Ambroise, informé de la résolution du jeune homme, en suspendrait l’exécution ou se hâterait d’en avertir madame de Flamarande. Il fallait empêcher son action sur Michelin ou sur Gaston dans cette circonstance décisive. Je me hâtai de rentrer à la ferme sur les pas des jeunes amants, qui m’y précédaient.

Je me mis à chercher Ambroise avec précaution dans le pavillon où l’on m’avait installé auprès de la chambre de maître préparée pour Roger. Cette vieille pièce, à meubles du temps de Louis XIV, attenait à une autre qui servait de salle à manger et qui était décorée dans le même style. C’est là que ordinairement Michelin écrivait et tenait ses comptes. Il avait déménagé ses papiers pour céder la place au maître attendu, et l’appartement bien nettoyé était assez confortable. La salle à manger ne servait au fermier que dans les grandes occasions. Tout était donc fort bien tenu et aussi bien conservé que possible. Michelin occupait comme autrefois avec sa famille l’étage au-dessus, qui était assez vaste et divisé en plusieurs pièces ; mais cette famille, malgré le mariage et le départ de deux des filles, était encore trop nombreuse pour qu’il y eût place pour Ambroise dans ce corps de logis. Je montai pourtant avec précaution, ayant un prétexte tout prêt pour demander Ambroise. Je fus