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Il s’était flatté de rester avec sa mère et son frère quelques jours de plus ; mais il s’exécuta avec courage et promit d’aller à Paris avec Salcède au commencement de l’hiver. Puis, comme nous étions bien en famille au salon, il embrassa passionnément sa mère et son frère et leur dit adieu. Il ne voulait pas les revoir devant témoins le lendemain matin ; il craignait qu’ils ne vinssent à se trahir en lui témoignant trop d’affection.

On alla se coucher de bonne heure ; Salcède resta au salon avec la baronne pour la préparer, je crois, à de plus sérieuses ouvertures après le départ de madame de Flamarande ; Roger suivit sa mère chez elle pour l’entretenir vraisemblablement du même objet. Il me dit à peine bonsoir et ne m’adressa pas un mot pour m’engager à rester attaché à la famille.

Le lendemain, même froideur et même silence. Enfin, pendant qu’on attelait les chevaux, il me demanda d’une voix brève si je retournais à Paris avec eux.

— Non, lui répondis-je, j’y retourne de mon côté, je quitte votre service, vous le savez bien.

— Tu sais, toi, reprit-il, sans trouver un mot pour me retenir, que tes cent mille francs sont toujours chez Salcède ?

— Je les refuse.

— Alors donne-les aux pauvres, ni moi ni Gaston n’accepterons ce cadeau.