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m’arrêta, me fit rasseoir de force et me dit d’une voix nette et ferme :

— Vous mentez ! vous êtes un fou ou un méchant homme ! Voyons, vos preuves tout de suite ! vous ne sortirez pas d’ici sans les avoir montrées.

— Je ne suis pas assez fou, répondis-je, pour les avoir apportées dans un lieu où je n’aurais pas la force de les défendre, et je veux bien vous dire que je n’en ai qu’une, mais elle est terrible, et vous pouvez la chercher sur votre poitrine, monsieur le marquis de Salcède. Le fac-similé y est encore, mais l’original est dans mes mains depuis longtemps.

Stupéfait, abasourdi, M. de Salcède porta la main à son reliquaire, l’ouvrit et regarda le petit papier. Dans cet examen attentif, il parut retrouver sa présence d’esprit.

— C’est vrai, dit-il, une main très-habile a reproduit l’original. Pourtant, je ne m’y serais probablement pas trompé, si j’avais ouvert le sachet ; mais, depuis quinze ans que je le porte nuit et jour dans une enveloppe chimique imperméable, je ne l’ai pas ouvert une seule fois dans la crainte d’en altérer le contenu, que je voulais conserver toute ma vie comme un talisman, comme un préservatif contre le découragement, comme ces amulettes dont les Orientaux ne se séparent jamais, et qui les entretiennent dans l’espoir d’une vie meilleure. C’était là mon verset du Coran, à moi, c’était