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Je me munis d’une lumière, je gagnai la chapelle et le jardin, d’où l’on pouvait sortir par une brèche escarpée. J’atteignis, sur le sentier, la porte de l’espélunque, celle par où l’on se rendait sans mystère au Refuge. M. de Salcède ne fermait pas habituellement cette porte ; je la trouvai ouverte. J’allumai ma bougie, j’arrivai à la sonnette de son caveau et je sonnai résolûment. Quelques minutes seulement, le temps de se lever, et il tira le ressort qui, du salon, ouvrait la porte du caveau. Je le franchis et trouvai la trappe ouverte au haut de l’escalier de bois ; le marquis, enveloppé d’une robe de chambre, l’avait déjà soulevée et me demandait avec inquiétude de quoi il s’agissait.

Je le priai de m’accorder une heure d’entretien. Il me fit monter chez lui, où je lui racontai sans réflexion ni commentaire tout ce qui s’était passé devant moi dans la soirée entre Roger, Gaston et Ambroise. M. de Salcède m’écouta avec la plus sérieuse attention, sans m’interrompre par un geste ni par un mot. Quand j’eus fini, il resta encore muet et absorbé durant quelques instants ; puis enfin il me dit sur le ton de la confiance et de la sympathie :

— Vous avez bien fait de me mettre au courant de ces choses, qui dérangent tous mes projets et qui demandent réflexion. Aidez-moi, vous le pouvez, je crois, à me rendre compte d’une situation si peu prévue ; vous connaissez à fond le caractère