Page:Sand - Les Deux Freres.djvu/107

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Je me sentais encore plus troublé en présence de M. de Salcède, et je pensais moins à observer sa manière d’être avec la comtesse que son attitude vis-à-vis de moi dans cette conférence intime. Il m’avait accueilli pourtant de l’air le plus naturel, et il m’invita à m’asseoir, sans paraître ni surpris ni contrarié de ma présence.

Madame de Flamarande lui exposa l’objet de sa visite. Ce fut l’affaire de peu de mots et comme la suite des entretiens précédents. Le marquis était d’un calme qui semblait irriter un peu la comtesse, mais auquel je ne me trompais pas : c’était le parti pris d’un cœur ferme, résolu à la sauver en dépit d’elle-même.

— Ne compliquons pas, lui dit-il, une situation déjà si difficile et dans laquelle il nous faut aviser et agir au jour le jour. Roger ne m’inquiète pas ; ce brillant esprit, ce caractère épris de mouvement et d’émotions, sera bien facile à distraire ; emmenez-le vite à Montesparre. Il n’y sera pas huit jours sans aspirer à revoir Paris. Je vous réponds qu’il ne songera pas à revenir ici. Ce qui presse le plus, c’est la déclaration que Gaston vous a faite de son mariage et qu’il va me faire tout à l’heure. C’est ici qu’il faut dire une fois pour toutes oui ou non. Je n’ai de droits sur lui que ceux dont vous m’investirez ; commandez-moi : dois-je dire non ?

La comtesse hésita et demanda au marquis ce qu’il répondrait à sa place.