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— Si fait ; mais je sais qu’il n’y a ni trou ni arbre qui nous puisse servir à rien. Il y a l’étang qui borde le préau ; mais je ne sais pas encore nager. Il a fait trop froid, depuis que je suis ici, pour que j’aie pu l’apprendre. Il y a bien une petite barque que l’on pourrait nous envoyer du château si l’on nous savait ici. Mais comment nous faire voir ? il fait trop nuit ; et entendre ? l’écluse fait trop de tapage ! Ah ! mon pauvre Aristandre est pris ou mort, puisque…

— Non pas, mon petit comte du bon Dieu ! dit, en dehors, une grosse voix qui essayait de se faire mystérieuse : Aristandre est là qui vous cherche et vous entend.

— Ah ! mon cher carrosseux ! s’écria Mario en jetant ses bras autour de la grosse tête qui passait par la lucarne basse du petit réduit. C’est donc toi ! Mais comme ta es mouillé, mon Dieu ! est-ce du sang ?

— Non, Dieu merci ! c’est de l’eau, répondit Aristandre, de l’eau bien froide ! Mais je n’en ai pas bu, heureusement pour moi ! J’ai été poussé, poussé, emporté malgré moi sur le pont dormant, par nos diables de paysans, qui reculaient pour entrer dans le préau. J’ai vu que j’allais être forcé d’y entrer aussi, et que je n’en pourrais plus sortir pour vous retrouver. Alors j’ai lâché mon dernier coup de pistolet, et j’ai sauté dans la rivière. Coquine de rivière ! j’ai cru que je n’en sortirais jamais, d’autant plus que, du château, on a tiré sur moi, me prenant pour un ennemi. Enfin, me voilà ! Il y a un quart d’heure que je vous cherche ; je me doutais bien que vous seriez dans l’affinoire (Aristandre appelait ainsi le labyrinthe) ; mais, depuis dix ans que je le connais, je ne sais pas encore m’y retourner. Allons ! il