Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol2.djvu/92

Cette page n’a pas encore été corrigée

château et ton trésor ; j’ai descendu, en chat, par une toute petite fenêtre, et j’ai suivi de loin la bande. J’espérais qu’on tuerait La Flèche et ces mauvais coquins qui n’ont jamais voulu avoir pitié de moi.

— Quels coquins ?

— Les bohémiens faiseurs de tours que tu connais, et puis beaucoup d’autres que tu ne connais pas, et qui sont venus se mettre avec eux. Ils m’ont bien fait souffrir à Brilbault, va !

— Qu’est-ce que Brilbault ? N’est-ce pas une masure du côté de… ?

— Je ne sais pas. Je ne sortais jamais, moi ! Ils couraient tout le jour et me laissaient avec le malade blessé, qui se mourait toujours, et son vieux domestique, qui me détestait, parce qu’il disait que c’était moi qui portais malheur au monsieur et l’empêchais de guérir. J’aurais bien voulu qu’il mourût plus tôt ; car je les détestais aussi, moi, ces Espagnols ! et j’ai fait bien des sorts contre eux. Enfin, le plus jeune est mort, au milieu de ces enragés qui buvaient, chantaient et criaient toute la nuit et qui m’empêchaient de dormir. Aussi je suis malade. J’ai toujours la fièvre… C’est peut-être heureux pour moi, ça m’empêche d’avoir faim.

— Ma pauvre fille, voilà tout l’argent que j’ai sur moi. Si tu peux te sauver, ça te servira ; mais, bien que je ne comprenne rien à ce que tu me racontes, il me semble que tu as été folle de venir ici, au lieu de t’en aller bien loin de La Flèche. Cela me fait craindre que tu ne sois d’accord avec lui pour…

— Non, non, Mario ! garde ton argent ! et, si tu crois que je veux te livrer, va-t’en te cacher ailleurs, je ne te suivrai pas. Je ne suis pas méchante pour toi, Mario. Il n’y a que toi au monde que j’aime ! Je suis venue, croyant