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d’affreux silence, il entendit un coup de feu et la chute d’un corps dans la rivière.

Quelques secondes après, la herse de l’huisset tombait à grand bruit, et une décharge de fauconneaux faisait reculer, avec d’effroyables vociférations, la troupe engagée sur le pont.

Une partie de ce drame incompréhensible était accomplie ; les assiégés étaient rentrés et enfermés dans le préau, les envahisseurs étaient maîtres de la basse-cour.

Mario était seul ; Aristandre était probablement mort, puisqu’il l’abandonnait au milieu ou, du moins, tout à côté d’ennemis qui, d’un instant à l’autre, pouvaient faire irruption dans ce jardin en enfonçant la grille et s’emparer de lui.

Et il n’y avait pas moyen de fuir sans escalader cette grille et sans risquer de tomber dans les mains de ces démons ! Le jardin n’avait d’issue que sur la basse-cour, et ne communiquait en aucune sorte avec le château.

Mario eut peur ; puis l’idée de la mort d’Aristandre et peut-être de quelque autre bon serviteur également cher fit couler ses larmes. Et même son pauvre petit cheval, qu’il avait laissé, la bride sur le cou, à l’entrée de la cour, lui revint en mémoire et ajouta à son chagrin.

Lauriane et Mercédès étaient en sûreté, sans doute, et il y avait encore bien du monde autour d’elles, puisque, du côté du hameau, un morne silence attestait que bêtes et gens s’étaient réfugiés tout d’abord dans l’enclos pour recevoir l’ennemi à l’abri des murailles. C’était l’usage du temps, qu’à la moindre alarme, les vassaux vinssent chercher en même temps qu’apporter aide et secours au manoir seigneurial. Ils y accouraient avec leur famille et leur bétail.