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Comme ils montaient rapidement un de ces petits chemins ondulés et bordés de grandes haies qui servaient de rues entre les trente ou quarante feux dont ce hameau se composait, le cheval de Mario, qui marchait le premier, fit un écart en soufflant avec détresse.

— Qu’est-ce donc ? dit l’enfant, qui resta ferme en selle. Un ivrogne endormi en travers du chemin ? Relève-le, Aristandre, et le reconduis à sa famille.

— Monsieur le comte, répondit le carrosseux, qui avait mis pied à terre lestement, s’il est ivre, on peut dire qu’il est ivre-mort, car il ne bouge non plus qu’une pierre.

— T’aiderai-je ? reprit l’enfant en descendant de cheval.

Et, s’approchant, il chercha à voir la figure de ce vassal, qui ne répondait à aucune des questions d’Aristandre.

— Si c’est un homme de l’endroit, dit celui-ci avec son flegme accoutumé, je n’en sais rien ; mais ce que je sais, par ma foi, c’est qu’il est mort ou qu’il n’en vaut guère mieux.

— Mort ! s’écria l’enfant ; ici, en plein bourg ? et sans que personne ait songé à le secourir ?

Il courut à la plus proche chaumière et la trouva déserte ; le feu brûlait, et la marmite, abandonnée, crachait dans les cendres ; le banc était renversé en travers de la chambre.

Mario appela en vain, personne ne répondit.

Il allait courir à une autre habitation, car toutes étaient séparées les unes des autres par d’assez vastes enclos plantés d’arbres, lorsque des coups de fusil et d’étranges rumeurs, dominant le bruit des pieds de son cheval sur les cailloux, le firent tressaillir et arrêter brusquement sa monture.