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et, chassé par une insurmontable répugnance, il s’élança dans la campagne, confessant sa peur à lui-même, et prêt à la confesser naïvement à quiconque lui en demanderait compte.

Il trouva le métayer qui l’attendait, plus mort que vif, sur le pont.

C’était pour le brave homme un acte héroïque d’être resté là à l’attendre. Il était incapable de dire ou d’entendre quoi que ce fût, et ce ne fut qu’on rentrant dans sa maison avec le marquis, qu’il osa l’interroger.

— Eh bien, mon pauvre cher monsieur Sylvain, dit-il, j’espère que vous en avez eu votre soûl, de voir leurs clartés et d’écouter leurs bramées ! Je croyais bien ne vous en voir jamais revenir !

— Il est certain, dit le marquis en avalant un verre de vin que lui offrait la métayère, et qu’il ne trouva pas de trop en ce moment, qu’il y a quelque chose de non ordinaire dans cette ruine. Je n’y ai rien rencontré de malfaisant…

— Eh ! si pourtant, mon bon monsieur, dit la Grand’Cateline, vous voilà plus blanc que vos rabats ! Chauffez-vous donc, seigneur, pour ne point attraper de mal.

— Pour le vrai, j’ai eu froid, répondit le marquis, et j’ai cru voir des choses que je n’ai peut-être point vues ; mais la marche me remettra, et je crains d’inquiéter mon monde en demeurant davantage. Bonne nuit à vous, bonnes gens ! Buvez à ma santé.

Il paya grassement leur obligeance et alla retrouver sa voiture, qui était revenue l’attendre au point où il l’avait quittée. Aristandre s’était inquiété ; mais, le marquis assurant qu’il ne lui était rien arrivé de fâcheux, le bon carrosseux se persuada qu’Adamas ne hablait point