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par un mouvement d’indignation ; car il devenait évident pour lui que cet homme, après avoir annoncé ses pleins pouvoirs, afin de le faire parler, feignait de ne pouvoir l’absoudre lui-même, afin de lui vendre son appui.

— Je conviens, dit-il, qu’en cachant la mort de d’Alvimar, j’ai suivi un mauvais conseil et fort contraire à mon propre avis. On m’a représenté que M. le Prince était grand catholique, et que j’étais accusé d’hérésie…

— Et la chose est vraie, mon pauvre monsieur. Vous passez pour un grand hérétique, et je ne vous cache point que M. le Prince est mal disposé pour vous.

— Mais vous, monsieur, qui me semblez moins rigoureux en vos idées, et qui me marquez avoir pris confiance en mes paroles, ne puis-je point compter que vous plaiderez ma cause et rendrez bon témoignage de moi ?

— J’y ferai mon possible, mais je ne vous réponds de rien, quant au prince.

— Que dois-je donc faire pour me le rendre favorable ? dit le marquis, résolu à connaître les conditions du marché.

— Je ne sais ! répondit le conseiller. On lui a dit que vous aviez chez vous un Italien… un hérétique de la pire espèce, qui pourrait bien, à ce qu’il semble, être un certain Lucilio Giovellino, condamné à Rome comme partisan des doctrines infâmes de Giordano Bruno.

Le marquis pâlit : il était resté calme devant son propre péril ; celui de son ami l’effraya.

— Vous en convenez ? dit le conseiller d’un ton léger. Quant à moi, je trouve ce malheureux assez puni et ne lui veux d’autre mal que celui qu’on lui a infligé. Vous pouvez tout me dire. J’essayerai de détourner les soupçons du prince.