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et à racheter du blé pour sa maison et ses vassaux pauvres.

Il y eut aussi à leur procurer le bétail qu’ils avaient perdu ; car les beaux messieurs de Bois-Doré ne voulaient point souffrir de misère autour d’eux.

Enfin, le fameux trésor dont on avait tellement exagéré l’importance, et qui avait failli attirer de si grands désastres et de si fâcheuses persécutions, cessa de faire scandale en cessant de faire magasin. Au vu et au su de tout le monde, les portes de la chambre mystérieuse furent et demeurèrent ouvertes.

On essaya bien de s’assurer de M. Poulain en lui offrant une part de la curée ; mais il eut l’esprit de refuser ; ce n’était d’ailleurs pas de richesse matérielle qu’il était avide, mais de pouvoir et d’influence.

Il voulait, disait-il, non posséder, mais être. C’est pourquoi il insistait pour avoir l’abbaye de Varennes, retraite assez pauvre, située dans un véritable trou de ruisseau et de verdure, sur la petite rivière du Gourdon.

Il la voulait sans plus de terre qu’il ne lui en fallait pour vivre avec deux ou trois religieux de l’ordre. Ce qu’il convoitait, c’était le titre d’abbé et une apparence de retraite qui ne l’enchaînât point aux devoirs journaliers du rectorat.

Il était déjà fort bien guéri, au bout d’un mois, du désir de renoncer au monde, et il caressait le rêve d’avoir seulement du pain et un titre assurés, afin de pouvoir se glisser auprès des grands et mettre la main aux affaires diplomatiques, comme tant d’autres, moins capables et moins patients que lui.

Bois-Doré comprit son genre d’ambition et la satisfit de bonne grâce. Il sentait bien que, tôt ou tard, M. le Prince, grand sécularisateur d’abbayes à son profit, lui