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quand vint le terrible ministère de Richelieu, il vécut fort tranquille, riche et sans honneur, dans sa bonne ville de Bourges et dans son beau château de Saint-Amand-Montrond.

Mais, à l’époque où notre recteur Poulain, après six semaines de démarches et d’intrigues vint à bout d’être introduit en sa présence, M. le Prince n’avait pas renoncé à toute ambition politique, et il devait encore jouer son rôle de vautour dans l’agonie du parti calviniste et dans celle du pouvoir royal, espérant s’élever sur les ruines de l’un et l’autre.

Le recteur croyait bien savoir à quel homme il avait affaire. Il le jugeait sur la réputation de bon prince qu’il s’était faite à Bourges : familier, vulgaire, parlant à toutes gens sans morgue, jouant avec les écoliers de la ville et les trichant volontiers, aimant bien les cadeaux, commère, très-serré, assez fantasque, excessivement dévot.

Le prince était bien tout cela ; mais il était tout cela beaucoup plus qu’on ne le savait encore. L’histoire prétend qu’il aimait beaucoup trop la société des écoliers. Il trichait par avarice et non par simple amusement ; il ne faisait pas comme Henri IV, qui rendait l’argent. Il aimait les cadeaux avec passion ; il était commère par envie et méchanceté ; il était avare jusqu’à la fureur, fantasque jusqu’à la superstition, dévot jusqu’à l’athéisme.

Lenet, dans son panégyrique, dit de lui très-ingénument, ou plutôt très-malicieusement :

« Il entendoit la religion et sçavoit en tirer avantage, connoissoit les replis du cœur humain autant qu’homme que j’aie connu, et jugeoit en un moment par quel intérêt on agissoit en toutes sortes de rencontres. Il sçavoit