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Et il s’élança à leur poursuite, laissant le marquis seul sous la voûte ouverte et dégagée, mais très inquiet de Mario, et ne pouvant lancer son cheval sur le pont dans la crainte d’écraser ses propres gens, qui étaient à pied et qui se jetaient en foule sur ce passage étroit pour atteindre les fuyards.

Enfin, le pont fut dégagé. Vainqueurs et vaincus s’élancèrent en avant. Le marquis put passer et vit venir à lui, sur sa droite, Mario, qui pensait pouvoir quitter sa retraite, maintenant que l’affaire semblait finie.

Quant aux bandits, tout danger paraissait dissipé en effet ; les fuyards ne songeaient qu’à s’échapper comme ils pouvaient dans toutes les directions ; quelques-uns se cachaient çà et là avec beaucoup d’adresse, tandis que les poursuivants passaient outre.

Un seul des vaincus n’avait pas bougé, et nul ne pensait à lui : c’était Sanche, toujours caché et agenouillé dans l’angle du moucharabi. De ce petit balcon à mâchecoulis, il eût pu faire tomber des pierres sur les Briantais, car il y avait toujours, dans la galerie de manœuvre, une provision de moellons bien mesurés à l’ouverture des mâchecoulis. Mais Sanche ne voulait pas trahir sa présence. Il voulait vivre encore quelques instants ; il regardait venir Mario et le visait à loisir, lorsqu’il vit, beaucoup plus près de lui et beaucoup plus à portée, le marquis à trois pas en avant du pont.

Il se fit alors en lui un violent combat. Quelle victime choisirait-il ? Il n’y avait pas alors de fusils à deux coups. Entre le père et l’enfant, la distance était trop courte pour permettre de recharger l’arme.

Dans sa lutte avec Aristandre, Sanche avait brisé un de ses pistolets et s’était vu arracher l’autre par ce vigoureux antagoniste.